Dynamique évolutive de R. solanacearum en réponse aux pressions de sélection de l’aubergine résistante : approche populationnelle, de génétique évolutive et fonctionnelle de la durabilité de la résistance : Soutenance de thèse

Jérémy Guinard, doctorant de l'UMR-PVBMT soutiendra sa thèse de doctorat le Lundi 14 Décembre 2015 à 14h00, dans l'amphi 120C à l'Université du du Tampon.

Résumé :

Ralstonia solanacearum est une béta-proteobactérie d’origine tellurique responsable du flétrissement bactérien sur solanacées. Cette phytobactériose est l’une des plus nuisibles au niveau mondial, capable d’infecter plus de 250 espèces différentes dont certaines présentent un intérêt économique majeur (tomate, pomme de terre, tabac). R. solanacearum est divisée en quatre phylotypes distincts présentant des origines géographiques différentes : I (asiatique), IIA et IIB (américain), III (africain), IV (indonésien). Parmi ces phylotypes, le phylotype I est en expansion démographique, hautement recombinogène, réparti mondialement et possède une large gamme d’hôtes. Il possède donc un fort potentiel évolutif (sensu McDonald et Linde, 2002). Afin de contrôler cette bactérie, la lutte génétique reste la méthode la plus prometteuse consistant à déployer des cultivars possédant différents sources de résistance (i.e., des gènes de résistance). La variété d’aubergine AG91-25 (E6) possède un gène majeur de résistance (ERs1), lui permettant de contrôler certaines souches de R. solanacearum de phylotype I. Cependant, la gestion de cette résistance requiert d’étudier au préalable sa durabilité afin d’en éviter le contournement. Cette durabilité peut être estimée en étudiant le potentiel évolutif d’un agent pathogène face à cette source de résistance, ainsi qu’en décryptant les mécanismes moléculaires de l’interaction entre l’hôte (gène R) et le pathogène (effecteur de types III [ET3]). Afin d’étudier la dynamique évolutive de R. solanacearum sous une pression de sélection exercée par la variété résistante E6, nous avons mis en place un essai d’évolution expérimentale au champ. Cet essai est composé de trois couples de microparcelles d’aubergines résistantes E6 et d’aubergines sensibles E8, implantées deux fois par an, pendant trois ans (soit 5 cycles). Un schéma MLVA (« Multi-Locus VNTR Analysis ») composé de 8 loci minisatellites a été développé afin de caractériser les souches extraites de ces cycles de cultures. Ces VNTR sont spécifiques aux souches de R. solanacearum de phylotype I, ils sont hautement polymorphes et discriminants à toutes les échelles : mondiale, régionale et locale.Nos résultats démontrent une absence de contournement de la résistance d’E6 par les populations parcellaires de R. solanacearum, confirmant le caractère durable de cette résistance. Cette variété aurait fortement réduit les populations bactériennes du sol, ne leur permettant plus d’infecter l’hôte résistant. Parallèlement, 100% des plants d’E8 sont morts à partir du cycle 2. La maladie au sein des microparcelles semble progresser de « plante-à-plante ». Une diminution de la diversité génétique a aussi été observée au cours des cycles de culture répétés d’E8, associée à l’augmentation en fréquence de deux haplotypes. Cependant, aucune structuration génétique claire n’a été observée à l’échelle de la parcelle entière ou de la microparcelle. Les données d’isolement par la distance semblent indiquer qu’une structure spatiale est en cours d’établissement. L’ensemble de nos résultats suggère une structure épidémique clonale de nos populations parcellaires.Nous nous sommes aussi intéressés à l’implication de 10 ET3 dans l’interaction R. solanacearum vs aubergine résistante (E6). La distribution des 10 ET3 candidats est variable au sein d’une collection de souches phylogénétiquement diverses (91 souches) : ripAJ et ripE1 sont les ET3 les plus partagés et ripP1 et ripP2 sont les moins partagés. Certains ET3 présentent peu (ripAJ) voire pas (ripE1 et ripP2) de polymorphisme de taille, alors que d’autres (ripAU) sont extrêmement polymorphes. Cependant la composition du répertoire d’effecteurs d’une souche ne semble pas être corrélée à un phénotype sur aubergine E6. Nous avons identifié le gène d’effecteur ripAX2 commeayant une fonction d’avirulence sur aubergine résistante E6. Sa reconnaissance par E6 semble s’opérer au niveau de la zone hypocotylaire. Cependant, la variabilité de cet effecteur ainsi que celle de son environnement génomique ne semblent pas associés à la virulence des souches de R. solanacearum sur E6.

Publiée : 16/11/2015